Vésubie les séismes de 1612 et 1618
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Le séisme du 30 juin 1612
Le 30 juin 1612 à 15 h, un tremblement de terre provoqua une grande frayeur parmi la population et fit sonner les cloches de la grande horloge de Nice. Les dégâts d’après l’historien Pierre Gioffredo (1629-1692), furent mineurs.
Bases de données
Ce séisme figure dans la base de l’INGV à la date du 31 janvier 1612 avec une intensité maximale de VI-VII (MCS) à Loano et Roquebillière le vieux dans la vallée de la Vésubie. Il a été attribué une magnitude de 4.9 Mw et un épicentre en territoire italien à la frontière actuelle avec les Alpes-Maritimes.
Cet évènement ne figure pas dans la base de données SisFrance.
Le séisme de 1618
L’historien Pierre Gioffredo (1629-1692), écrivit que deux tremblements de terre notables, survinrent l’année 1618, le premier au début de l’année et l’autre à la fin. La secousse fut ressenti en premier provoquant une grande peur dans la nuit du 14 janvier 1618. Une autre secousse se répéta dans la nuit du 18 de ce même mois. Le tremblement de terre s’avéra avoir fait d’importants dégâts dans tous les villages entourant Nice, particulièrement à Roccasparviera, Coarasa, la Bolena et Lantosca, dans lesquels le séisme fit tomber des maisons et des églises et divisa des morceaux de montagnes de telle manière, que beaucoup de personnes fuirent les terres et allèrent vivre quelque temps dans des cabanes, sous des tentes et des toiles dans les campagnes dégagées. On raconta aussi que le tremblement de terre ouvrit les murs pourtant très solides du château de Saorgio, avec un grand danger pour Onorato Peyre, qui y était emprisonné...
La peur se renouvela lorsque le 4 mai, jour du Saint Sindono, une secousse se fit à nouveau sentir au lever du jour. Les dégâts du deuxième tremblement de terre, survenu vers la fin de l’année, furent moindres, surtout les 25 et 27 novembre [1].

(Photo : André Laurenti)
Giuseppe Mercalli (1850-1914), reprit sans doute les notes de Gioffredo et ajouta quelques publications du Scagliero et écrivit, les 14 et 16 janvier 1618, fortes secousses à Nice mais sans dégâts (Scagliero). Le 18 vers 8h (matin soir ?), très fort séisme à Nice. Les secousses se poursuivirent jusqu’au 4 mai, cette dernière se fit sentir le matin au lever du jour [2]. Baratta ajouta deux autres évènements ou répliques, vers minuit le 29 septembre nouveau tremblement intense à Nice et plus encore le 15 novembre à l’heure du coucher du soleil [3].
L’historien Urbain Bosio situa le séisme le 14 et 16 juin 1618, mêmes jours, même année mais pas le bon mois, sans doute une erreur de traduction entre gennaio (janvier) et giugno (juin). L’auteur écrivit que de fortes secousses furent ressenties à Nice sans causer de dégâts écrit-il. L’auteur précise qu’elles ébranlèrent fortement la montagne du Férion, provoquant l’effondrement de maisons et de fermes à Duranus, Roccasparvière et Coaraze [4].
Ce tremblement de terre fut ressenti dans tout le Comté de Nice, faisant beaucoup de dégâts à Lantosque, Roccasparvière et à Coaraze. Dans la campagne d’Utelle, deux femmes et trois enfants furent tués sous les ruines d’une maison.

(Photo : André Laurenti)
Abandon du village de Roccasparvière
Ce tremblement de terre semble avoir a été l’origine de l’abandon du village de Roccasparviere situé sur le flanc Est de la crête des Graus, entre la vallée de la Vésubie et le val naissant du Paillon à l’Est.
L’historien contemporain Pierre Robert Garino, rapporta dans son ouvrage, que le canal d’acheminement en eau de Roccasparvière (1 100 m d’altitude) fut endommagé et que le lieu de captage qui se situait au col de l’Autaret (1 240m d’altitude), s’affaissa de plusieurs mètres, privant l’approvisionnement en eau courante le village [5]. Cette catastrophe incita les habitants à abandonner petit à petit les lieux, pour la commune de Duranus à l’ouest et le hameau de l’Engarvin à l’est.
Dans le tout petit ouvrage de Paul Canestrier qui a été curé à Saint-Jean la Rivière en 1930, on retrouve les mêmes raisons qui ont poussé les habitants de Roccasparviere à abandonner le village. L’auteur indiqua que le "Raccolta" de Jules Uberti, mentionné comme étant l’un des trésors de l’église paroissiale de Duranus, contient le journal précis de l’exode de la population. Les gens dit-il, optèrent pour leurs campagnes de Duranus, un site "plus commode et plus salubre" à trois mille pas en aval, à mi-côte sur la vallée de la Vésubie. Sept ans après le séisme, à partir de 1625, "les chefs de famille, les Blancart, Imbert, Gasiglia, Laurenti, Giordan, Gioffert, Gilli, Roux, Massiera, les uns après les autres désarticulèrent les masures tremblantes, descendirent les poutres et les tuiles, puis pièce par pièce, le four banal, le moulin et autres édifices publics" [6].

(Photos A. Laurenti)

Carte interactive de l’évènement cliquez pour agrandir
Par ailleurs, l’historien Louis Durante (1781-1852), rapporta pour le village de Toudon situé non loin de là, que le 12 mars 1619 une énorme masse de terres et de rochers se détacha tout à coup de la sommité de la montagne, au quartier dit la "Roche-Rousse", avec un horrible fracas, elle parcourut l’espace de 400 toises (soit 779 m) et emporta les habitations inférieures [7]
Y aurait-il un rapport avec le séisme de 1618 ? quoiqu’il en soit cela reste à but informatif.
Enquête sur le patrimoine religieux
Retracer l’histoire connu des édifices religieux de la zone affectée pourrait être une piste intéressante et nous livrer des informations sur d’éventuelles réparations ou reconstruction.
L’église de Saint-Jean Baptiste de Coaraze aurait été construite avant 1348. Sur une pierre de fondement figure la date de 1452 extérieurs du maître autel. Une autre date 1527 figure sur le linteau de la porte d’entrée. Par ailleurs, une inscription latine indique « l’an du Seigneur 1717, cette communauté éleva et acheva cette église trois fois tombée et trois fois restaurée » [8].
L’église Notre Dame de l’Assomption de Duranus fut édifiée au XVIIe siècle, peu d’information sur cet édifice.
L’église Saint-Pons (1668) à Lantosque, présente une architecture spécifique (façade relativement basse, large et trapue…) qui a été conçue pour résister aux secousses des tremblements de terre [9].
L’histoire de l’édifice nous apprend que l’église fut mise en service en le 30 août 1668 (plaque noire dans le chœur à gauche),la date de 1665 est inscrite sur le linteau d’entrée. L’église primitive était une chapelle dédiée à Saint-Blaise et se trouvait à l’emplacement de la sacristie. Elle fut agrandie vers 1600 (un écrit de 1641 parle de l’agrandissement vers le sud. L’auteur indique que l’église est de style Baroque flamboyant moins marqué qu’à Utelle ou Saint-Martin soit parce qu’elle a été construite plus tôt alors que style n’était pas encore très développé, soit à cause des séismes successifs : en 1564 (le plus destructeur), puis en 1620 et 1644 qui ont particulièrement touché Lantosque et l’église qui était encore en travaux [10]. Effectivement le registre des délibérations de la Bollène de 1887 mentionna que le séisme de 1644 renversa l’église [11].
La date de 1620 est sans doute une erreur, il s’agit probablement du séisme de 1618.
Remarques
Suite aux récits connus, on peut supposer que les répliques se soient produites jusqu’au mois de mai, cependant, rien n’affirme que les évènements de fin d’année aient eu la même origine. Ce tremblement de terre semble avoir affecté une faible étendue, ce qui laisse supposer que le foyer était proche de la surface.
Voire la base de données SisFrance
[1] Pierre Gioffredo : Storia delle Alpi Marittime (1662) - p282 à 283 - Volume 6
[2] Mercalli Giuseppe "I terremoti della Liguria e del Piemonte - 1897
[3] Barrata M. : I terremoti d’Italia - 1901
[4] Urbain Bosio - La province des Alpes-Maritimes - 1902
[5] Garino Pierre-Robert "Duranus autrefois Rocca-Sparviera" - Serre Editeur - 192 pages - année 1993
[6] Canestrier Paul "Roccasparviera village tragique" - année 1930 - 26 pages - (Bibliothèque ville de Nice Réf BM/PL 6506)
[7] Durante L. chorographie du Comté de Nice - Turin : Année 1867
[10] Otho Alain : Visite guidée 26 avril 2008 dans le cadre des samedis de l’AMONT
[11] Alphonse Gayraud : Extrait du registre des délibérations du Conseil Municipal de la Bollène Vésubie en date du 21 mars 1887 - Marie de la Bollène Vésubie
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