Le bicentenaire de la naissance de Louis Pasteur

Le 27 décembre sera l’occasion de commémorer le bicentenaire de la naissance de Louis Pasteur. Cet article est consacré à un passage agité qui a marqué la vie de Louis Pasteur et sa famille lors de leur venue sur la Riviera italienne.
En octobre 1886, harcelé par le travail et aussi par la charge de responsabilité, Louis Pasteur donnait de sérieux signes de fatigue. Son médecin, le docteur Grancher lui conseille un repos de plusieurs semaines sur les bords de la Méditerranée [1].

Raphaël Bishoffsheim, banquier, homme politique et grand admirateur de Pasteur, possédait une villa sur la Riviera italienne, à Bordighera. Une somptueuse demeure dont l’architecte Charles Garnier avait été chargé en 1873 d’en réaliser le projet et de la construite. Elle sera terminée en 1875 et mise presque tout de suite, en location à des familles fortunées. Elle inspira Claude Monet puisqu’elle fut représentée sur plusieurs œuvres du peintre.
Bishoffsheim, protecteur des sciences mis pour six mois, la villa à la disposition de Louis Pasteur.
Ainsi, à la fin du mois de novembre 1886 la famille Pasteur quitte Paris gare de Lyon par le train salon, le voyage a été long [1].

(Photo : André Laurenti)
Pasteur et sa famille arrivent enfin dans la capitale azuréenne le mercredi 24 novembre 1886 et font une halte de 40 minutes en gare de Nice avant de poursuivre vers l’Italie.
Il a été chaleureusement reçu en « prince de la science » par Alfred Borriglione Maire de Nice entouré par les autorités locales dont MM. Henri Perrotin et Louis Thollon tous deux astronomes à l’observatoire du Mont-Gros (actuel Observatoire de la Côte d’Azur). Le bref arrêt terminé, la famille Pasteur poursuit son voyage vers l’Italie.
A Vintimille, le savant est traité comme un ambassadeur, le Ministre de l’intérieur italien avait passé la consigne pour que les bagages ne soient pas fouillés et est conduit à Bordighera sous la surveillance d’un douanier français [2].
La famille Pasteur parcourt les dix kilomètres restant jusqu’à la villa en voiture. Pasteur si installe enfin, le 24 novembre 1886 en compagnie de sa femme Marie, sa fille Marie-Louise, son gendre et ses petits enfants Camille et Louis. Ils ont prévu de résider en ce lieu boisé d’oliviers jusqu’en avril 1887.
Seulement voilà, les caprices de la nature en ont décidé autrement. Après de fortes pluies et les inondations de novembre, l’hiver 1886-1887 a été l’un des plus froids avec de la neige en basse altitude. Et pour couronner le tout, la famille Pasteur va connaître l’effet bouleversant d’un tremblement de terre.
1887 : Le grand tremblement de terre de la Riviera à la Belle Époque
En effet, le matin du mercredi 23 février 1887, Marie Pasteur s’apprête à se rendre à la cérémonie des Cendres qui marque le début du Carême. Soudain, la villa se met à vaciller dans un vacarme épouvantable. Les enfants Camille et Louis qui dormaient accourent en pleurant. Lorsque tout le monde retrouve leur esprit, il faut se rendre à l’évidence, la villa n’est plus habitable. L’une des colonnes du campanile est brisée, d’inquiétantes lézardes courent sur la façade Nord et le reste du bâtiment est couvert de fissures. Dans la matinée, un entrepreneur confirme que l’édifice risque de s’effondrer.
La santé de Pasteur ne permet pas de passer la nuit dehors dans le froid et l’humidité. De plus, les lignes télégraphiques ayant été coupées, Pasteur est complètement isolé du monde et ne peut donner des nouvelles aux proches ni en recevoir. Le départ a été épique, il ressemblait plutôt à une exode le tout dans une pagaille indescriptible. « A grand-peine on trouva une voiture, car le trafic ferroviaire avait lui aussi été interrompu. Il fallut neuf heures pour parcourir les dix kilomètres qui séparent Bordighera de Vintimille et plus encore pour aller jusqu’à Menton [1].

Le jeudi 24 février au soir, toute la famille arrive tant bien que mal par l’express de Nice à Marseille. Sans doute épuisée par ces deux jours pénibles, ils descendent au Terminus Hôtel où Ils doivent se contenter d’une petite chambre, car tout est complet par les hivernants qui ont fui la Riviera [3].
Quelques jours après, de retour à Arbois, Pasteur écrira :
« Rien ne peut vous donner une idée de ce qui a été cette longue minute de bruits insolites, où toute la maison oscillant et craquant du faîte à la base était prête à nous engloutir sous ses décombres (…). Ce que nous avons passé, éprouvé est indicible. Je n’y puis encore penser sans qu’un frisson parcoure tout mon corps. »
La famille Pasteur resta traumatisé par cet événement au point de ne plus jamais vouloir retourner dans le Midi [1].
La villa Bishoffsheim à Bordighera a été par la suite, rebaptisée en 1896 par Lord Claude Bowes Lyon 14e comte de Strathmore et Kinghorne, il l’a renomma « Etelinda ». Cette villa existe toujours et se situe au n°38 de la via Romana, elle est devenue un bien protégé [4].
[1] Darmon Pierre – Pasteur – Editions Fayard – Année 1995
[2] Le Petit Niçois du 1 décembre 1886 – Archives Départementales des Alpes-Maritimes
[3] Le Petit Marseillais du 25 et 26 février 1887 – Retronews le site de presse de la B.N.F.
[4] Source wikipedia
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