Séisme de 1887 : la première nuit dans le froid

mardi 12 septembre 2023

Le terrible drame qui a touché sévèrement le Maroc, rappelle que le littoral azuréen n’est pas à l’abri d’un tel fléau. Il y a 136 ans, nos ancêtres ont vécu sur la Riviera française et italienne, un terrible tremblement de terre d’une magnitude similaire à celle du Maroc. Le séisme s’est produit le mercredi 23 février 1887 à 5 h 55, heure à laquelle la plupart des horloges de Nice s’arrêtèrent. Une violente secousse jeta un peu partout dans les rues des dizaines de milliers de personnes. Dans l’après midi, chercher un gîte pour la nuit devint la grande préoccupation de chacun. Les niçois et les monégasques furent avantagés par rapport aux mentonnais et aux populations des villages de l’arrière pays, plutôt démunis et parfois oubliés. Voici comment tous ces habitants ont improvisé leur première nuit à la belle étoile et dans le froid de l’hiver.

Menton
Campement dans le quartier du Borrigo

A Nice
Les nombreuses répliques faisaient peur, pas question donc de retourner dans les maisons. Nice bénéficia très vite de l’aide, grâce au 111e régiment de Nice et deux compagnies de chasseurs à pied qui vinrent en renfort de Villefranche. Le génie militaire fit élever dans l’après midi sur les places publiques et les jardins de la ville, des tentes sous lesquelles prirent place en très grand nombre de femmes et d’enfants. A la gare, la compagnie PLM mit gratuitement des wagons au service du public avec des bouillottes et un vaste local fut mis à la disposition des femmes d’employés PLM. Sur les hauteurs de Cimiez, 2 000 Russes, Américains et Anglais campèrent en plein air sous les oliviers. Au Port de Nice, plus de 4 000 personnes passèrent la nuit à bord des barques et dans les cabines de tous les bateaux.
L’écrivain et journaliste Albert Duruy écrivit dans une lettre, que le préfet n’a pas quitté la ville, mais on assure qu’il a passé la nuit dans un confortable landeau sur le bord de mer.…
Fasse à une demande importante, certains, ne manquèrent pas d’abuser. « on loua des cabines de bain sur la plage et des landaus, des voitures à prix d’or entre 150 à 200 fr (environ entre 650 et 850 euros), que l’on fit conduire dans les près, dans les champs.

Quartier Vernier à Nice
Campement place Mozart petite rue St. Etienne au sud de la gare
(Recueil sur le tremblement de terre de 1887 - Paris Libraire Editeur - BNF Gallica)
Nice
Campement rue Pertinax

Menton une ville oubliée
Dans cette ville la plus affectée de la Riviera française, cinq mille personnes se trouvèrent dehors, à dormir à la belle étoile, sans compter les étrangers dont un grand nombre avaient pris la fuite le jour même. Cependant, durant les premiers vingt quatre heures qui ont suivi le choc principal, la ville fut oubliée. Malgré les demandes du Maire, aucune tente ne fut envoyée pour abriter les sinistrés et le pain commença très vite à manquer, l’ensemble des fours avaient été démolis par le tremblement de terre. le pain manquera tout le mercredi et tout le jeudi, il arrivera de Nice seulement trois jours après.
Toute cette population s’installa dans les jardins d’hôtels, sur les places publiques, sur la plage, emmitouflée dans des couvertures, enveloppée dans des toiles de toute sorte. Le moindre abri pour se protéger du froid était recherché, ainsi des personnes s’installèrent sur la plage dans des embarcations recouvertes d’une toile, prêt à affronter une première nuit dans le froid. A cette époque les effets des tsunamis n’étaient pas encore bien connus.

Menton
Campement sur la plage de la basse ville
Menton
Campement sur la plage à l’ouest du Bastion représenté en arrière plan
Menton
Campement sur la plage

La nuit du 26 au 27 février fut horrible. Un vent glacial s’était déchaîné sur ces pauvres gens grelottant de froid et de fièvre, une personne perdit la vie.
Le salut vint enfin d’une généreuse initiative de l’entreprise Cauvin Yvose, une société spécialisée dans la production de toiles imperméables qui était en pleine expansion en France et qui possédait de nombreuses succursales, notamment de Paris à Marseille. Dès que la nouvelle se rependît la société envoya 350 tentes et bâches.

Campement à Menton
Campement au droit du pont Neuf et de la rue Partouneaux, avec en arrière plan l’actuel hôtel des Ambassadeurs
(Archives Municipales de Menton)
Campement à Menton
Campement dressé par la population sur la place des Carmes (actuellement place Loredan Larchey)
(The illustrated London News - saturday March 12, 1887)
Menton
Campement au droit du kiosque à musique

Principauté de Monaco
le Gouvernement monégasque demanda au 111ème de ligne, des tentes pour faire camper les habitants. Ainsi, sur la place du Palais, la place d’Armes, le terrain des héritiers Blancs, rue Louis, la Place du Casino, tous les endroits un peu vastes et dégagés, se couvrirent de tentes.
Le Gouverneur prit aussi différentes dispositions pour assurer l’ordre et la sécurité publique. C’est ainsi que les cafés et tous les magasins en général ont été autorisés à tenir ouvert toute la nuit afin d’éviter aux habitants de rester dans la rue et dans le froid. Le propriétaire de l’hôtel d’Angleterre, fit construire, une tente spacieuse sur un terrain vague près de la mer et offrit les plus empressés soins et un bon feu à bon nombres de personnes épouvantées et sans asile.

Dans les villages
Dans le moyen et haut pays, aucune aide ne vint des villes, les habitants improvisèrent des lieux pour dormir dans les maisons encore debout ou dans des granges, des bergeries. Ils durent surtout compter sur l’entraide des villages voisins comme se fut le cas pour la Bollène Vésubie et Castillon sur les hauteurs de Menton, dévastés par le séisme.

Voir plus de détail sur les effets du séisme à :
Nice
Menton
Principauté de Monaco



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